La première cure de Napoléon III à vichy en 1861 est décisive. La cité thermale accueille alors, l’été, plus de 16 000 curistes. Le souverain déplore l’absence d’un bâtiment dédié aux divertissements et souhaite doter Vichy des meilleurs atouts pour rivaliser avec les autres stations thermales européennes. À sa demande, un Casino est construit d’après les plans de l’architecte Charles Badger et inauguré le 2 juin 1865. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, le nombre de curistes à Vichy ne cesse d’augmenter et le bâtiment ne répond plus au besoin de la station.

La Compagnie Fermière, sous l’instance du Conseil Municipal décide alors de doter la cité d’un vaste périmètre thermal avec de nouvelles infrastructures. Une nouvelle salle de théâtre est alors construite dans le prolongement du Casino existant pour former le Grand Casino de Vichy.

Le 2 juin 1901, Aïda est le premier opéra à être représenté dans la nouvelle salle de théâtre, conçu par l’architecte Charles Le Cœur, assisté du jeune Lucien Woog et de Jules Simon. La décoration intérieure n’est achevée que pour l’inauguration officielle le 31 mars 1903 en présence du ministre des travaux publics Maruéjouls.

La façade principale s’ouvre sur le parc, elle est ornée de trois grandes portes qui offrent un décor floral inédit de fer forgé réalisé par Emile Robert, repris à l’intérieur sur les rampes d’escaliers et les balustrades.

La salle, d’une capacité de 1483 places, est à l’époque la plus grande salle de théâtre de province. Toutes les grandes oeuvres lyriques peuvent y être présentées grâce à sa scène rectangulaire, qui mesure 18 x 16 m, avec une hauteur de cintres de 22 m. Les artistes et les techniciens disposent de cinq étages de loges et de foyers.

Parfait exemple de style « Art Nouveau », son décor peint par Léon Rudnicki est unique, tout entier voué aux motifs floraux qui s’harmonisent avec les couleurs or et ivoire. La coupole lumineuse, sans lustre, est entourée par deux couronnes, l’une de roses et l’autre de lyres.

La lyre, élément très présent, se retrouve le long des pourtours de l’orchestre, dans le creux des arbres du deuxième balcon, et aux retombées de la voûte où l’instrument est orné de rubans, végétaux, et de visages d’artistes de l’époque, ornés de pierres, tels Sarah Bernhardt, Réjane…

Le front de scène est décoré par deux paons blancs qui reposent chacun sur une harpe et encadrent les dates 1864 et 1901 surmontées du masque de la tragédie. Les deux visages féminins, pseudo-byzantins, qui surmontent les loges d’avant-scène, sont l’oeuvre de Pierre Seguin, comme tous les éléments sculptés de la salle.

Entre 1901 et 1964, Vichy est réputée « capitale d’été de la musique ». C’est durant la période de l’Entre-deux-guerres, que l’Opéra est à son apogée. Un orchestre de 100 musiciens, 90 choristes, une troupe de solistes, danseurs et comédiens résident à Vichy à la belle saison. En moyenne, 90 représentations sont données chaque été, ainsi que des spectacles d’art dramatique, des variétés et des ballets.

En juillet 1940, la salle de l’Opéra abrite le vote des pleins pouvoirs au Maréchal Pétain par les députés et sénateurs; 80 d’entre eux s’y opposent courageusement. Après la seconde guerre mondiale, l’Opéra retrouve son faste, orchestres et troupes se reconstituent, Le Grand Casino organise de 1952 à 1963, parallèlement à sa programmation, le « Festival de Vichy » vitrine de luxe des saisons d’été.

Le déclin du thermalisme amène la diminution de l’activité artistique, orchestre et artistes en résidence disparaissent en 1970.

Néanmoins, l’Opéra accueille toujours de belles productions via les résidences de l’Opéra de Bordeaux et de l’Opéra du Rhin.

En 1987, la ville devient propriétaire des lieux et engage dès 1994, avec l’aide de l’Etat, de fonds européens et du Département, sous l’égide des Monuments Historiques, la restauration à l’identique de la salle de l’Opéra, et la création du Palais des Congrès.

Depuis 1990, sur le plan artistique un nouvel élan a été déployé.  Les infrastructures ayant été rénovées et restaurées dès 1995, elles permettent désormais d’accueillir le public durant deux saisons : l’hiver dédié au théâtre, à la danse, au spectacle vivant et l’été qui célèbre la musique classique sous toutes ses formes avec entre autre les Rencontres Lyriques Européennes et ses opéras. Depuis maintenant plus d’un siècle, la salle de l’Opéra accueille artistes et spectateurs dans un cadre rare.

Source : Mémoire d’un théâtre - J. Alviset