Le Procès de Jeanne
La comédienne Judith Chemla et le metteur en scène Yves Beaunesne donnent vie au procès de Jeanne d’Arc en utilisant ses propres mots pour mieux révéler ce symbole de résistance et de courage.
À travers une œuvre où se mêlent théâtre, musique et vidéo, les artistes nous plongent dans les accusations d’hérésie et de sorcellerie portées contre elle au printemps 1431 à Rouen. Les paroles de Jeanne elle-même, pendant son procès, telles que restituées par le greffier, sont un témoignage inouï de sa liberté de ton, de son insolence, sa force, son humour face à des juges pour qui elle n’était qu’une manipulatrice et une menteuse.
Ce texte du XVe siècle apparaît d’une grande modernité et fait écho au déni de prise en compte de la parole des femmes.
Entre enjeux politiques et esprit de revanche des anglais, ce spectacle poignant nous plonge dans le procès et la condamnation de la « Pucelle d’Orléans ». Les juges, ainsi que les pensées intérieures de l’accusée défilent sur un écran octogonal surplombant la scène. Jeanne, entourée d’instrumentistes, évolue dans une scénographie stylisée enchevêtrant l’imaginaire à la réalité.
Être sur scène, c'est ce que vous préférez ?
Judith Chemla : être sur scène m'a toujours fait vibrer. C'est un endroit sacré où l'on partage des émotions entre êtres humains en direct. C'est merveilleux parce qu'on vit un instant tous ensemble. On ne peut pas faire semblant. C'est de la fiction mais les sentiments que j'éprouve sur scène en chantant par exemple La Traviata, ils sont vrais, je les vis vraiment. D'ailleurs, je prépare un nouveau spectacle pour l'an prochain aux Bouffes du Nord, cette fois sur Jeanne d'Arc…
Vous pouvez en dire plus ?
JC : j'ai demandé à Yves Beaunesne de faire la mise en scène, parce qu'on avait travaillé ensemble sur L'Annonce faite à Marie, et à Camille Rocailleux d'écrire la musique. Ce sont des artistes avec qui j'aime travailler, qui se laissent inspirer, traverser par le sujet, qui ne sont pas là pour faire leur show. Le texte, ce sera les mots de Jeanne elle-même, pendant son procès, tels que restitués par le greffier… Ces mots sont un témoignage inouï de sa liberté de ton, de son insolence, sa force, son humour face à des juges pour qui elle n'était qu'une manipulatrice et une menteuse. Cela me fait penser à ce qui se passe pour beaucoup de femmes aujourd'hui quand elles portent la parole de leurs enfants. On est en pleine campagne gouvernementale contre l'inceste et pourtant des milliers de mères qui cherchent à protéger leurs enfants sont poursuivies par la justice… Ces femmes se retrouvent devant des juges qui ont décidé qu'elles étaient des menteuses et des manipulatrices comme cette Jeanne qui a traversé l'histoire jusqu'à aujourd'hui car elle a préféré mourir que mentir. Je veux porter la voix de ces femmes à travers ce spectacle.
Propos de Judith Chemla recueillis par Laura Berny pour Les Echos, le 16 octobre 2023
D’après les minutes du procès de condamnation de Jeanne d’Arc en 1431
Judith Chemla et Yves Beaunesne Conception
Yves Beaunesne Mise en scène
Camille Rocailleux Musique
Marion Bernède Livret
Damien Caille-Perret Scénographie
Pierre Nouvel Vidéo
César Godefroy Lumières
Jean-Daniel Vuillermoz Costumes
Catherine Bénard Coiffures et maquillages
Juliette Séjourné Assistanat à la mise en scène
Avec
Judith Chemla Jeanne d’Arc dite La Pucelle
Mathieu Ben Hassen Percussions et chant
Emma Gergely Violoncelle et chant
Robinson Julien-Laferrière Trombone et chant
Etienne Manchon Piano, synthétiseurs et chant
Marie Salvat Violon, alto et chant
Hippolyte De Villèle Cor et bugle
À l’image
Jacques Bonnaffé L’évêque de Beauvais, Monseigneur Pierre Cauchon, Président
Thierry Bosc Jean de la Fontaine, clerc du diocèse de Bayeux, conseiller examinateur
Jean-Claude Drouot Jean Beaupère, chanoine de Rouen, professeur de sacrée théologie
Patrick Descamps Guillaume Erard, Docteur en théologie réputé de l’Université de Paris
Jean-Christophe Quenon Nicolas Midi, insigne docteur en théologie
Léonard Berthet-Rivière Jacques de Touraine, franciscain
Michel Vanderlinden : Jean Massieu, doyen de la chrétienté de Rouen, huissier du procès
Eric Pucheu Martin Ladvenu, frère mendiant
Antoine Laudet Nicolas Loyseleur, dominicain
Frédéric Cuif Guillaume Manchon, notaire greffier
Eliot Berger Un clerc anglais
Remerciements à Cécile Kretschmar
Durée : 1h30
Production
Centre International de Créations Théâtrales / Théâtre des Bouffes du Nord
Coproduction
Théâtres de la Ville de Luxembourg ; Opéra de Limoges ; Théâtre de Caen ; Vichy Culture - Opéra de Vichy ; Théâtre Saint-Louis - Pau ; Compagnie de La Chose Incertaine - Yves Beaunesne ; Théâtre Impérial - Opéra de Compiègne ; Centre d’art et de culture de Meudon ; Espace Michel-Simon de Noisy-le-Grand.
Avec le soutien du Cercle de L’Athénée et des Bouffes du Nord et de sa Fondation abritée à l’Académie des beaux-arts. Avec le soutien du Centre national du cinéma et de l’image animée.